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CatchScape
La gestion de l'eau : Une problématique conflictuelle dans les bassins
versants du nord Thaïlande
Nicolas Becu (ENGREF), Pascal Perez (CIRAD), Andrew Walker (RSPAS-ANU)
En
avril 1998, un évènement extraordinaire eut lieu dans le nord de la Thaïlande.
Cinq mille paysans Thai vivant dans les plaines du district de Chom Thong
manifestaient leur colère et bloquaient l'une des routes principales.
Ils demandaient la délocalisation forcée de près de 20 000 villageois
des tribus vivant dans le haut du bassin, les accusant d'être responsable
de grands déséquilibres écologiques : déforestation, feux de forêt et
assèchement des rivières durant la saison sèche. Ce conflit se retrouve
à l'état latent dans de nombreux autres bassins de cette région et constitue
un enjeu important pour les institutions locales (Walker et Scoccimarro,
1999). CatchScape propose une représentation de ces systèmes, en se focalisant
sur les aspects de gestion de l'eau. L'objectif du modèle est de servir
d'outil d'aide à la négociation pour les acteurs locaux afin qu'ils puissent
définir des solutions concertées.
Vers
un modèle intégré…
L'une des idées fortes de ce travail était de rompre avec l'approche
purement physique de la représentation d'un bassin versant et de replacer
les agents fermiers au centre du système. Les différents modules du système,
bio-physiques, sociaux ou économiques sont donc greffés autour de l'agent
central : l'exploitation agricole familiale. La démarche de modélisation
a consisté à définir pour chacune des ressources gérées par les agents
la dynamique de cette ressource et ses interactions avec les autres dynamiques.
Quatre ressources ont été intégrées dans le modèle : l'Eau, le Travail,
l'Argent et le Foncier.
Structure de CatchScape
La
grille du modèle est une vue aérienne du bassin versant. Chaque cellule
est caractérisée par un type d'occupation du sol (forêt, zone de cultures
pluviales, bas fond irrigué) et par un type géomorphologique de sol. L'espace
est à géométrie variable permettant d'avoir des dimensions de cellules
à l'échelle des parcelles agricoles. Les agents agriculteurs sont définis
par une série d'attributs, notamment ceux définissant la quantité de chaque
ressource à leur disposition. A l'initialisation, les agents reçoivent
les quantités
de ressources correspondant à leur système de production, puis ces quantités
évoluent en fonction des choix effectués. La dynamique bio-physique est
constituée d'une part d'un modèle de bilan hydrique distribué, permettant
de calculer l'humidité du sol sur chaque parcelle et le stress éventuel
des cultures, et d'autre part d'un modèle hydraulique simulant l'écoulement
de l'eau dans la rivière puis dans les canaux d'irrigations. Les canaux
sont gérés par des chefs de barrage qui déterminent la quantité d'eau
prélevée dans la rivière. La gestion individuelle consiste à choisir une
culture en début de saison, en privilégiant le riz qui est auto- consommé,
à fournir du travail (familial, entre-aide ou rémunéré) pour les activités
entreprises, à gérer son portefeuille (dépenses familiales, achat d'intrants…)
et occasionnellement à acheter de nouvelles terres ou d'autres améliorations
foncières. La gestion de l'eau à l'échelle individuelle consiste uniquement
à irriguer ses parcelles en fonction de la quantité disponible dans les
canaux. Lors de la saison sèche, lorsque l'offre en eau devient insuffisante,
les chefs de barrages ont la possibilité de collaborer et de négocier
entre eux, afin de satisfaire leur demande. Plusieurs types d'entre aide
sont possibles : des tours d'eau entre deux canaux d'un même périmètre
ou bien des négociations entre deux périmètres afin de diminuer les prélèvements
en amont.
Premiers résultats …
Les premiers essais montrent bien une dominance des parties amont quant
à la gestion de l'eau et ce d'autant plus que les comportements sont individualistes
et que la gestion collective est négligée. CatchScape apparaît comme une
bonne base pour explorer le fonctionnement du système et améliorer le
modèle selon les principes de la modélisation d'accompagnement (Bousquet
et al., 1997). Différents types de scénarios peuvent être simulés tels
que des fluctuations de prix, des impacts climatiques ou encore d'autres
modes de gestion de l'eau. L'étape suivante de ce travail consiste à utiliser
ce modèle auprès des acteurs locaux et de s'en servir, directement ou
via un support de communication plus adapté, comme outil d'aide à la négociation.
Pour en savoir plus, contactez
les auteurs.
Références
Bousquet, F., Barreteau, O., Mullon, C. et Weber, J., 1996. Modélisation
d'Accompagnement: Systèmes Multi-Agents et Gestion des Ressources Renouvelables.
Quel environnement au XXIème siècle ? Environnement, maîtrise du long
terme et démocratie, Abbaye de Fontevraud.
Walker, A., Scoccimarro, M., 1999. A ressource Management Unit Approach
to Catchment Analysis in Northern Thailand. iCAM Working Paper (2), Australian
National University.
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